33

"Ouvrez la bouche, tirez la langue, dites 33 ..." "Euh, Docteur, on ne dit pas haaaa d'habitude ?"

Non, aujourd'hui on dit 33. On sourit 33, on mange 33, on boit 33 mais un seul verre suffira. On vit 33.

Aujourd'hui je dis 33, et je suis heureuse de le dire. Des années durant j'ai appréhendé les fêtes d'anniversaire, la boule au ventre et l'envie de me planquer six pieds sous terre. Je n'avais pas envie qu'on me souhaite de passer un nouveau cap alors que je ne savais pas où j'allais. Aujourd'hui je dis 33 à qui veut bien l'entendre et je taille une route qui me paraît si belle.

Je dis 33 et c'est derrière moi, les 31 et les 32, les années qui tanguent et qui se cognent contre les murs, les gadins qu'on prend parce qu'on a fait semblant de pas voir les ornières. On se relève, on se frotte les genoux, ça a saigné mais on s'en fout, c'est fini maintenant. On enlève les petits cailloux qui se sont incrustés, faudrait pas que ça s'infecte. Pas de pansement, ça sert à rien, ça cicatrise mieux au grand air. Un bisou magique et c'est guéri.

Je dis 33 et je rêve que j'arrête de rêver, que mes 33 ans me prennent par la main et me poussent loin, loin, où l'on arrête de douter et où l'on ose enfin. Qu'ils me fassent cesser les "ce serait chouette si ..." et que ce soit chouette, demain, tout de suite, maintenant. Je dis 33 et je dépose le permis de construire mes rêves en vrai.

Je dis 33 et c'est une année compte triple, je baisse les yeux sur ce ventre déjà bien gros pour le terme, ça fait des bulles là-dedans et je suis déjà loin, loin, je suis déjà à 3, à 5, à mes mains qui ne sont plus assez mais à mon cœur et mes bras qui ne demandent qu'à se remplir un peu plus. Je suis loin devant le miroir à contempler mes cernes et mes cheveux blancs, à sourire de mes yeux fatigués à ce visage qui a simplement vécu. Je suis là devant les photos d'il y a 10 ans enviant le teint lisse et frais de la jeune fille souriante, mais pourquoi sourit-elle, elle ne connaît pas encore le bonheur absolu.

Je dis 33 et j'ai l'impression de renaître. Je me retourne et je ne regarde que le meilleur et ce qui nous fait avancer. Certaines choses sont floues, mais le reste, c'est éclatant, ce sont des rires, des sourires édentés, des premiers cris qui en ont précédé bien d'autres, des "caca-prout" et des "je t'aime fort Maman", des câlins par milliers, ce parfum de nouveau-né inoubliable et qui me chavirera encore bientôt. Ce sont des regards et de l'amour à deux parce qu'il en faut tellement pour être cinq.

Je dis 33 et que c'est chouette d'en être arrivée là.







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