Ma grande.

Des billets sur toi, je pourrais en écrire des centaines, tant il y aurait de choses à dire. J'en ai commencé des milliers, sans jamais aller jusqu'au bout, sans les partager, griffonnés à l'encre rose sur un bout de carnet. Il y a trop à dire, trop à penser, trop à réfléchir, trop à remettre en question, mille fois, trop à angoisser et te regarder en me demandant si tu es heureuse.

Et demain, 7 ans déjà. 7 ans tout pile mais j'ai l'impression d’en avoir vécu le double à tes côtés. Tu as tout fait de moi. Une mère, une louve, une furie, une psy, une instit, une infirmière, un immense point d'interrogation. Je t'ai donné la vie, et toi tu m'as offert le reste, même ce que je n'imaginais pas.

Je te regarde grandir, jour après jour, question après question, et je ne peux m'empêcher de me revoir. De revoir tout ce qui a fait de mon enfance un souvenir pas très joyeux, plein de solitude, de rêverie, de trouille, de mille questionnements et de ce sentiment d'être à part. Je me demande si ces 7 années et les autres à venir te laisseront le même goût doux-amer, et ça me ronge un peu, beaucoup. Je voudrais tellement tout comprendre, tout apaiser, tout prévenir, te protéger si fort, de toi, de nous, des autres et de cette société moche qui nous entoure. 

Je sais ta fragilité, tes émotions puissance mille, ton sens de la justice. Je sais cet arbre dans ta tête, aux milles branches que tu voudrais toutes explorer, et le temps infini que cela demande. Je sais ton esprit qui vagabonde si loin que tu en oublies notre petit monde ici-bas. Je sais tes rires sans limites et tes pleurs tout autant. Je sais tout ça et je n'y peux rien.

J'aime ton air concentré, tes boucles folles, ton sourire énorme et tes dents pas parfaites. J'aime tes baisers sur mon gros ventre et quand tu touches pour savoir où est la tête du bébé. J'aime t'entendre lire des histoires et te voir mettre de la couleur partout avec application. Je ne le dis surtout pas mais j'aime t'entendre dire des bêtises et rire à gorge déployée avec ta petite sœur, comme ivre. J'aime te la voir embrasser si fort le matin avant de courir vers ton école et en oublier vos disputes. J'aime quand tu oublies ta pudeur et que tu nous offres des câlins et des je t'aime.

Je t'aime si fort et c'est parfois trop, mais ce n'est jamais trop finalement quand on a un enfant.

Je t'admire, aussi. J'admire ce don que tu as, cette façon de voir le monde et de t'émerveiller de tout, t'intéresser à tout, t'interroger sur tout. J'ai du mal à suivre parfois et le sentiment de ne pas t'arriver à la cheville, alors je potasse et je bachote pour être à la hauteur de tes attentes et ne pas te décevoir.
J'admire cette ténacité qui fait de toi une tête de mule, même si je râle parce que tu ne cesses jamais, jamais d'insister. J'admire ta mémoire éléphantesque et les souvenirs invraisemblables que tu ramènes souvent à la surface, bien que tu ne te rappelles jamais ce que tu as fait le matin-même à l'école.
J'admire tant de choses en toi et je te le dis si peu.

Avec toi, je suis intransigeante, je râle, je peste, je crie, je suis probablement l'inverse de ce que je rêvais d'être, avant. Avant toi.
Avec les autres, grands ou petits, ceux qui ne te comprennent pas, ceux qui ne voient pas en toi la petite fille exceptionnelle que tu es, tous ces gens même proches qui, simplement, ne savent pas, je peux mordre, maudire et détester. Je ferais n'importe quoi pour te protéger. 

Mais demain, rien de tout cela. Demain, tes 7 ans, ta fête, ton moment à toi, ta parenthèse enchantée. Juste tes yeux qui pétillent, où danse la flamme des bougies.

Ma grande, ma douce, mon crabe, mon zèbre, ma furieuse, ma moitié, ma chair. Ma fille.



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